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  • : VERONIQUE NARAME - JOURNALISTE
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LE CHOIX DE LA REDACTION

 

 

ALTERNATIVES INTERNATIONALES  n° 067

Juin 2015

       Boko Haram épuise le Cameroun

Par Véronique Narame
A Maroua et Minawao
 
couverture
                  

Depuis un an, le Cameroun fait face aux assauts meurtriers de la secte nigériane Boko Haram. Et contribue, depuis 2013, à l'accueil sur son territoire de 40 000 réfugiés nigérians dans le camp de Minawao.

 

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LE CHOIX DES INTERNAUTES

JUIN 2015

Algérie / Industrie électrique et électronique : Moderniser et restructurer

Algérie  / Maritime : L'Algérie combine mer et terre

Côte d'Ivoire / Socitech Groupe : Contribuer à la digitalisation de l'Afrique

Burkina Faso / Sibiri François Yaméogo, Styliste Modéliste

Algérie / Photo reportage au Salon international du livre d'Alger

Burkina Faso / Des infrastructures performantes pour l'industrie

 

 

19 avril 2011 2 19 /04 /avril /2011 05:33

 

L’aide aux réfugiés

 

Paru dans New African - Mai-Juin 2011 

 

6_101-l14075.jpgL’Afrique subsaharienne subit de plein fouet les contrecoups des révolutions en Afrique du Nord, et en particulier celle de la Libye.

 

Les troubles en Libye sont lourds de conséquence pour des centaines de milliers d’Africains sud-sahariens qui sont contraints de fuir les combats tout en se cachant pour ne pas subir de violences. En différents points du pays, à Benghazi ou à Tripoli, des expéditions punitives sont menées contre eux. Des manifestants les accusent d’être des mercenaires à la solde du régime du colonel Kadhafi. Des réfugiés érythréens seraient détenus dans l'ouest et l'est du pays. En mars dernier, 300 Sénégalais sans ressources, bloqués à Sabha, dans le centre de la Libye, envoyaient un SOS aux autorités de leur pays, leur demandant de les rapatrier de toute urgence. (photo UNHCR / A. Duclos )

Le Sénégal, le Nigeria et le Rwanda ont affrété des avions, tout comme le gouvernement gambien qui a rapidement transféré plus de 1 000 nationaux ainsi que des Bissau-guinéens, des Guinéens et des Maliens. Les premiers Burkinabé qui ont transité par Djerba, en Tunisie, sont arrivés à Ouagadougou le 20 mars. Leurs témoignages sont accablants. Le Ghana a mis en place un pont aérien pour évacuer, en quelques jours seulement, plus de la moitié des 11 000 travailleurs ghanéens de Libye.

 

Le rapatriement de 20 000 Maliens s’organise via les différentes chancelleries en Afrique du Nord. Il en est de même pour les 600 000 travailleurs immigrés tchadiens et leurs familles. Les autorités qui les ont engagés à passer la frontière terrestre par le sud, ou via l’Egypte, coordonnent les opérations.

Ceux qui n’ont pu bénéficier d’une prise en charge se réfugient en Tunisie ou en Egypte. Ils arrivent par milliers, traversant des zones à risque et s’exposant au danger d’être enrôlés de force dans l’armée libyenne, d’être dépouillés de leurs biens ou tués. Dans les camps de réfugiés, l’aide s’organise. L’association humanitaire Médecins du monde déplore l’absence de prise en charge psychologique de ces personnes particulièrement vulnérables, eu égard aux conditions dans lesquelles elles ont fui la Libye et aux atrocités dont elles ont été témoins. Selon l’Association malienne des expulsés (AME), 2 500 Maliens attendent des convois pour être rapatriés au Mali.

 

Organisation des secours

Plus de 1 000 Subsahariens de différentes nationalités ont trouvé asile dans le sud de l'Algérie. D’autres ont fui vers le Niger. A Dirkou, une commune située à plus de 500 kilomètres de la frontière libyenne, ils étaient plus de 2 000 début mars. Parmi eux, une majorité de Nigériens et des Africains de l’Ouest originaires du Ghana, du Mali, du Nigeria, du Sénégal, de la Sierra Leone ou du Togo. Les Nations Unies estiment à 60 000 le nombre de personnes en provenance de Libye qui pourraient franchir la frontière du Niger dans les semaines à venir. Les ressources alimentaires sont mises à rude épreuve et les prix grimpent, a fortiori en raison de la rupture de liens commerciaux avec la Libye qui était un des principaux fournisseurs. Pour l’heure, c’est d’Agadez ou de Niamey, la capitale, située à 1 600 kilomètres, que provient la nourriture.

L’approvisionnement en eau et l’assainissement sont aussi limités et l’émergence de maladies est à craindre, à défaut d’infrastructures d’hygiène. Les réfugiés, principalement des hommes, sont progressivement acheminés, sous escorte militaire, à Agadez et au-delà. L’activité de ce pays à l’économie déjà très fragile est de fait ralentie. C’est le cas notamment de l’exportation de chameaux et des transferts de fonds des migrants, des ressources particulièrement importantes pour les régions au nord-est du Niger.

Des Somaliens, des Erythréens, des Ivoiriens et des Ethiopiens ont été transportés par bateau vers Alexandrie, tandis que des Soudanais attendent leur départ dans le camp de réfugiés de Salloum, en Egypte. Trois mille Subsahariens du Mali, du Ghana, du Tchad et du Niger ont été pris en charge dans des avions affrétés par le Haut-commissariat aux réfugiés (HCR). 

Mais certains préfèrent rester en Libye plutôt que de rentrer les mains vides au pays. Un ouvrier burkinabé explique que son passeport a été saisi lors de son embauche par la compagnie qui l’a recruté, laquelle n’est plus joignable et l’a laissé sans ressources. Comme lui, des Guinéens, Nigériens, Nigérians, Togolais ou Béninois n’ont plus d’autre choix que d’attendre un hypothétique retour au calme, au moment même où les premières frappes de la coalition internationale atteignent leurs cibles. Si la guerre devait s’intensifier, ces hommes et ces femmes d’Afrique subsaharienne, déjà très stigmatisés, pourraient être les otages de conflits auxquels ils sont étrangers.

Pour d’autres, le retour au pays d’origine n’est pas envisageable, comme pour les Ivoiriens et les Somaliens qui vont devoir s’exiler ailleurs à cause de la guerre qui sévit chez eux. C’est le HCR qui décidera au final de leur sort, ainsi que de celui des Erythréens qui bénéficiaient – avec les réfugiés somaliens – de l’asile politique en Libye. Il faudra négocier le départ de ces 7 000 à 8 000 personnes vers d’autres terres d’accueil. S’il en existe encore. Car rares sont les pays qui acceptent ces Africains.

Le soulèvement en Libye interpelle sur le statut et le sort de ces bataillons d’ouvriers précaires qui œuvraient à la construction de la puissante Jamahiriya, laquelle avait du reste établit un partenariat gagnant-gagnant avec l’Europe pour lutter contre l’immigration clandestine. Le Conseil de l’Union européenne était ainsi convenu, en 2005, de mettre progressivement en place une coopération concrète sur cette question avec les autorités libyennes. C’est ce qui autorisait le « Guide » à se présenter comme le garant incontournable de la stabilité en Afrique du Nord et dans toute l'Afrique. La Libye a, du reste, usé de ce pouvoir en menaçant de ne plus exercer son rôle de garde-côte de la Méditerranée.

 

Investir dans le capital humain

Pour l’heure, cette menace est bien inutile. Les Subsahariens ont en effet plus à craindre à rester en Libye qu’à se replier vers leurs pays d’origines. A choisir entre vivre caché pour échapper à une mort certaine, ou se saisir de cette occasion de départ pour retourner au pays et y rester, il est probable que beaucoup préfèreront la dernière hypothèse, laquelle leur évitera de tenter de remonter le corridor sahélo-saharien jusqu’aux côtes de l’Afrique du Nord, pour gagner l’Europe.

Puissent-ils alors se fixer durablement dans l’un de ces Etats d’Afrique, ou d’ailleurs, qui a fait le pari de relever le défi de son développement et qui est déterminé à investir dans le capital humain plutôt que de laisser mourir les siens pour une cause qui n’est pas la leur. Sur ce plan, la Gambie a donné le ton en réservant le meilleur accueil à ses ressortissants de retour sur la terre natale ainsi qu’aux Ouest-Africains qui ont pu bénéficier de cette opération de sauvetage. Elle les a assurés de son soutien et les a engagés à prendre part à l’essor de la nation.

En capitalisant sur tous ses acquis, l’Afrique subsaharienne peut garantir un avenir plus favorable à ses pairs. Les investissements dans maints domaines ne manquent pas : agriculture, télécoms, tourisme, eau et énergie, industrie, infrastructures, banque, santé, éducation… Il n’est plus utopique de penser que les Etats souverains de cette Afrique et leurs forces vives trouveront vite les moyens de soutenir leur croissance pour que les regards se tournent vers d’autres rivages que ceux de la Méditerranée.

 

 

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