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  • : VERONIQUE NARAME - JOURNALISTE
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LE CHOIX DE LA REDACTION

 

 

ALTERNATIVES INTERNATIONALES  n° 067

Juin 2015

       Boko Haram épuise le Cameroun

Par Véronique Narame
A Maroua et Minawao
 
couverture
                  

Depuis un an, le Cameroun fait face aux assauts meurtriers de la secte nigériane Boko Haram. Et contribue, depuis 2013, à l'accueil sur son territoire de 40 000 réfugiés nigérians dans le camp de Minawao.

 

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LE CHOIX DES INTERNAUTES

JUIN 2015

Algérie / Industrie électrique et électronique : Moderniser et restructurer

Algérie  / Maritime : L'Algérie combine mer et terre

Côte d'Ivoire / Socitech Groupe : Contribuer à la digitalisation de l'Afrique

Burkina Faso / Sibiri François Yaméogo, Styliste Modéliste

Algérie / Photo reportage au Salon international du livre d'Alger

Burkina Faso / Des infrastructures performantes pour l'industrie

 

 

5 août 2011 5 05 /08 /août /2011 19:55

    

L’or et le coton pour soutenir le développement humain 

Paru dans African Business – Août-Septembre 2011

 

Le Burkina Faso a récemment accédé aux premiers rangs des pays africains producteurs de métal jaune et il est également classé dans le peloton de tête pour la production de coton. Mais en dépit de ces ressources, le développement humain accuse un grand retard.

 3414-1.jpgRiche de ses deux ressources, or et coton, le Burkina Faso n’en demeure pas moins pauvre. Le Rapport mondial sur le développement humain du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) le positionne en queue de cortège, au 161e rang sur… 169 pays.  Pourtant, ce ne sont pas les ressources qui manquent. En dépit de l’aridité du climat, de la rareté de l’eau, de l’enclavement géographique et des problèmes occasionnés par le conflit en Côte d’Ivoire, l’Etat burkinabé vise à l’autosuffisance alimentaire et parvient, en sus, à exporter une partie de sa production.

Or, coton, mangues, haricots verts, karité, mil, sorgho, maïs, sésame, arachides, produits de l’élevage, artisanat… Les Burkinabé ne chôment pas. Ils sont toujours à la tâche. Le taux de croissance annuel s’est ainsi maintenu à 2% de 1970 à 2008 (1,1% au Ghana, 1,8% en France et 1,9% aux Etats-Unis). Le Revenu national brut (RNB) par habitant s’élevait, en 2008, à 1 215 dollars, quasiment comme l’Ouganda (1 224 $) qui le précède en 143e  position et le Ghana (1 385 $) qui est au 130e rang. Pourtant, en termes de développement humain, le Burkina Faso ne décolle pas.

L’espérance de vie à la naissance d’un Burkinabé est de 53,7 ans (57,1 ans au Ghana et 81 ans en Norvège), et la durée moyenne de scolarisation (chiffres 2009) est d’à peine 1,3 an, alors qu’elle est de 4,7 ans en Ouganda et de 7,1 ans au Ghana. L’indice de « satisfaction de vivre » est de seulement 3,6 sur une échelle de 1 à 10 (8,1% en Norvège). Sur le nombre des répondants qui se déclarent satisfaits, seul 24% le sont au regard de leur niveau de vie.

En 2010, 73% de la population vivait sur des terres dégradées. Deux ans plus tôt, 24% ne disposaient pas de d’eau courante et 89% étaient privés d’accès à l’assainissement, tandis que 90,6% de la population vivait sans électricité. Les décès dus à une pollution intérieure et extérieure de l’air et de l’eau se chiffraient, en 2004, à 3 130 par millions de personnes (1 692 en Ouganda, 1 283 au Ghana et 65 en Norvège).  

Ce qui vaut pour le développement humain est hélas valable pour l’emploi et les conditions de travail. En 2008, 47% d’enfants âgés de 5 à 14 ans travaillaient et 60,7% du nombre total d’actifs subsistaient avec moins de 1,25 $ par jour (37,6% au Ghana). Le PIB de 522 $ par habitant est à comparer à celui de 44 508 $ pour la France et  94 759 $ pour la Norvège, en tête du classement.

 

Des financements à géométrie variable

Pour pallier l’insuffisance de ressources et de revenus, les bailleurs de fonds internationaux interviennent pour soutenir le Burkina Faso.

En 2008, 12,6% du RNB du pays provenait ainsi de l’aide au développement des institutions financières internationales, tandis que les Iles Salomon, classées en 123e position en termes de développement humain, étaient investies à hauteur de 35,1%, et que le quart (26,3%) du RNB de Sao Tomé-et-Principe, classé 127e par le Pnud, était fourni par les bailleurs de fonds.  

De la même manière, les Investissements directs étrangers (IDE) n’atteignent pas des sommets sur le territoire burkinabé. Le flux de capitaux privés correspond à 1,7% du PIB. Bien moins qu’au Ghana où ils pointent à 12,7%. Par comparaison, le total d’IDE de la France équivaut à 3,5% du PIB, celui de la Belgique à 19,8% et du Luxembourg à 215,6%. Pourtant, des réformes ont été engagées par les autorités pour libéraliser l’économie et promouvoir le secteur privé. L’amélioration du climat des affaires a d’ailleurs été soulignée par la Banque mondiale, et le rapport Doing business 2011 a classé le Burkina Faso au quatrième rang mondial des réformateurs les plus constants durant les cinq dernières années.

L’attractivité du pays n’est plus à prouver. Du reste, les multinationales des filières aurifère, cosmétique, agroalimentaire et cotonnière sont positionnées pour développer leurs activités ou entretiennent des relations commerciales.    

Des contrats - en particulier pour l’extraction minière ainsi que pour l’achat de coton - sont bel et bien signés mais, en retour, le développement économique et social ne suit pas. L’industrie de transformation est à l’état embryonnaire. L’investissement dans la recherche et le développement ou encore la formation est à la traîne. L’accès aux technologies de l’information et de la communication demeure excessivement restreint. Pour preuve, seulement 0,6% de la population était équipée d’un ordinateur entre 2006 et 2008. Tout cela ne concourt pas au renforcement de la compétitivité de l’appareil de production. « Les IED réalisés dans le pays demeurent concentrés dans quelques secteurs (mines, télécommunications, banques, services). L’impact de ces investissements privés sur le développement de l’économie du pays reste encore limité », confirme le Conseil présidentiel pour l’investissement. 

 

Une rémunération à la hauteur des ressources fournies

Malgré ces multiples contraintes et un soutien somme toute assez timoré de la Communauté internationale et des investisseurs, le pays a toujours fait en sorte de maintenir ses équilibres. Mais sa marge de manœuvre est mince. Il n’a guère d’autre choix que de pourvoir aux attentes du marché en fournissant des produits dont le prix d’achat est fixé par de lointaines places financières. En aucun cas il ne peut aller a contrario d’un scénario établi par ses créanciers – bailleurs de fonds et investisseurs. Ces dernières semaines pourtant, les cotonculteurs et les acteurs miniers ont manifesté leur mécontentement en réclamant l’amélioration de leurs conditions de travail et des augmentations de revenus.   

En mai, Beyon Luc Adolphe Tiao, Premier ministre, s’est entretenu avec les acteurs du secteur minier. Il a été question de la définition d’un cadre de partenariat entre les investisseurs, les employés ainsi que les populations locales, et de l’adoption d’une convention collective régissant le secteur des mines. « La législation minière dans le pays comporte, au stade actuel, des lacunes », a précisé la Primature. « Il est évident que les travailleurs dans les mines doivent être rémunérés à la hauteur de leurs efforts parce qu’il y va de la paix sociale. L’industrie minière, qui agit aussi sur un environnement donné, doit participer à l’amélioration de vie des populations de la localité ».

Il a fallu aussi négocier avec les cotonculteurs qui avaient manifesté, en avril, à Bobo Dioulasso, exigeant la hausse des prix d'achat du coton et la baisse de celui des intrants. L’Etat a dû dégager une enveloppe de 6,1 milliard F.CFA pour subventionner l’achat d’engrais, laquelle s’ajoute aux 36 milliards de F.CFA précédemment alloués à la filière cotonnière ces dernières années. Mais le problème n’est pas pour autant résolu. Le cotonNumeriser0026.jpg burkinabé est en concurrence avec celui des Etats-Unis et d’Europe qui est largement subventionné. Les exportateurs de ces pays peuvent donc écouler à bas prix leur coton sur le marché mondial tandis que les producteurs burkinabé – et africains - subissent la chute des cours de l’or blanc. A plusieurs reprises, le président Blaise Compaoré a demandé la suppression de ces subventions déloyales. En 2003, il a pris la parole à la tribune de l’Organisation mondiale du commerce, déclarant : « Nos pays ne demandent pas la charité, ni un traitement préférentiel ou des aides additionnelles. Nous demandons seulement le respect de la loi du marché, conformément aux principes fondamentaux de l’OMC. Nos producteurs sont prêts à affronter la concurrence sur le marché mondial du coton, pour peu que celle-ci ne soit faussée par les subventions ».

Huit ans plus tard, la question soulevée demeure d’actualité. Mais entre-temps, le peuple burkinabé a fait valoir son aspiration bien légitime à l’amélioration de ses conditions d’existence en contrepartie du travail âprement fourni.

 

- Crédit photo : Unicef et Sofitex -

 

 

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