« Et la lumière en ce jardin »
Catherine Rossi
Editions Chèvre-feuille étoilée
168 pages
Paru dans Arabies - Mars 2010
Il se dégage de prime abord de ces pages comme un sentiment de gâchis. Comme si la Grande Histoire avait brisé les rêves de plusieurs générations, les précipitant ainsi inéluctablement dans le chagrin. Ces récits de familles qui s’entremêlent et finissent par se confondre mettent en scène la destinée d’êtres qui laissent une part d’eux-mêmes à chaque départ pour le front et reviennent fatalement meurtris.
C’est tout d’abord Léonce, tout juste revenu des sombres tranchées de Verdun et qui part s’affranchir de sa situation militaire en Algérie, découvrant la « mentalité coloniale ». Suzanne, qu’il épousera, sera témoin de cette « frontière infranchissable » avec le personnel domestique. Puis ce sera au tour de leur fils de sacrifier sur d’autres fronts sa jeunesse pour servir - comme tant d’autres - la patrie.
Pourtant, par-delà les déchirures occasionnées par ces « harangues totalitaires et ces crimes dont la honte ne finira pas de poursuivre les deux tiers de la planète », vaincra l’incompressible élan de vie. Et ces protagonistes malgré eux parviendront finalement à renouer les fils épars de ces itinéraires fragmentés et à recomposer, par petites touches successives, un motif à l’éclat moins écarlate.
C’est en Tunisie, au Maroc et en Egypte, que nous emmènera la narratrice, puis finalement en Algérie, où elle emboitera le pas de son grand-père… « Bou Saâda, l’oasis du bonheur, qu’il me semblait si bien connaître sans l’avoir parcourue, pour y tracer l’itinéraire d’un homme dont même la tombe avait disparu. »